Ceci n’est pas un oiseau.


Nietzsche, n’avait-il pas raison de faire le lien entre l’art et la philosophie ? Dans son ouvrage Le livre du philosop...
Abdelmajid BAROUDI

Nietzsche, n’avait-il pas raison de faire le lien entre l’art et la philosophie ? Dans son ouvrage Le livre du philosophe, il écrit que La maîtrise de la science ne se produit désormais plus que par l’art. C’est dans ce sens que le tableau du grand peintre Magritte : Ceci n’est pas une pipe a énormément contribué au débat sur l’articulation de la réalité avec la vérité. Le premier arrêt sur ce tableau convertit la négation en affirmation. Autrement, le sens commun ne peut que remarquer qu’il s’agit effectivement d’une pipe photographiée et non peinte. Or, l’artiste nous renvoie à nos contradictions, du moment qu’il bannit la réalité en vue de nous inciter à repenser la vérité. D'où la différence entre ce qui est conçu et ce qui est vécu. Comment donc percevoir la vérité ? La réponse nous parvient de l’extérieur de ce monde dans lequel le sens commun est emprisonné. Il a fallu qu’un prisonnier sorte du monde ténébreux qu’est la réalité pour déduire que la vérité transcende la réalité. Qui plus est, cet exercice d’ordre déductif est un processus qui s’anime par le biais de la contradiction, de bas en haut, de l’obscurité à la lumière, des sens à la raison.

Dans le pays des mille et un contrastes, l’inconcevable devient règle et la folie, pour ne pas dire la déraison, l’emporte sur le discursif. Où vivons-nous ? A chaque fois que le pacte moral porte la signature d’une trahison inattendue, l’incurable sème le doute. Toutefois, toute initiative prise pour remédier à la situation se heurte à l’imprévisible. Ce monde devient fou, on dirait qu’on vit dans une immense psychiatrie et non dans une société. Réveille-toi Aristote, ils ont démoli tout ce que tu as construit. Ils ont déformé la formule et le sens de la définition. L’Homme n’est ni parlant ni raisonnable. C’est l’oiseau qui parle. C‘est lui qui nous abêtit. Après tout, il a raison d’emprunter ce langage puisqu' il nous prend pour des cons, voire des bêtes. Il a donc affaire à des malades mentaux privés d’accompagnement psychologique. Cet animal parlant n’est pas un oiseau qui nous réveille doucement et nous invite à sourire au monde. Non, c’est un oiseau qui veut nous humilier davantage. Son génie réside dans sa capacité à séduire la prédisposition et plaire à la tromperie des principes. Si je savais que tu faisais partie de ce choral animé par cet oiseau maudit, je ne poserais jamais ma signature sur le papier qui indique que nous sommes liées à un pacte, lequel stipule que le Droit est transversal au culturel, au politique et au social. Tu n’as pas pu préserver ton autonomie. Tu as facilement cédé au chantage de l’oiseau en cautionnant le mensonge de cette créature et en invitant les mêmes termes avec lesquels tu prétendais contribuer à l’élaboration au projet de société, aussi platonicien soit-il. Somme toute, l’oiseau maudit est plus habile que toi.

Le Phénix renaît de ses cendres .Le feu symbolise son éternité. C’est dans la mort qu’il retrouve son éternité puisqu’il bannit l’illusion de la fin et l'éphémère, alors que l'oiseau fantôme n’a pas bénéficié de la bénédiction de la nature car sa naissance est nourrie de la volonté de la puissance. Son histoire est liée aux années de plomb. Incapable de voler, l’oiseau monstrueux est né plumé et le restera toute sa vie. Son existence dépend de son créateur. Il se métamorphose, tantôt en caméléon, tantôt en crocodile. Son bec se transforme en grande gueule. Il avale dans son chemin toutes les consciences misérables. En caméléon, il reprend tout ce qu'il a appris durant son parcours soit disant universitaire sans se soucier ni de l’imprévisible, ni de l’histoire, comme si la réalité n’était qu'une vague sur laquelle il étale son mépris du passé.

Vous méritez plus, me cracha-t-il. Quel discours méprisant et misérable. Oui, nous méritons plus car notre silence n’a fait qu’accentuer la complicité. On t’a appris à te moquer de notre intelligence. Oui, on mérite plus parce que nous avons cultivé la confiance en celles et ceux qui ont choisi le prétexte au détriment du souffle. Je sais qu’au fond de toi tu ne crois pas en ce discours mensonger. J'imagine le Phénix te fustiger. Tu ne ressembles à aucun oiseau. Tu ressuscites du leurre. Tu as préféré le frais sur la patience, l’illusion sur la vérité. Tu as fait de l’illusion ta vérité, tu as préféré l'opportunisme sur le désintéressement. Sois sûr, il n'y a que ton passé qui te pleurera et puis l’oubli t'enterrera. Tu n’auras pas droit à la prière de l’absence. De l’autre côté du cimetière l’écho d’une voix criante : Vivre dans la dignité ou mourir dans la dignité, lui lance le Phénix en signe de mot d’Adieu.